En bref :
- La plupart des provinces et territoires se sont dotés de dispositions légales ou de politiques des Collèges qui rendent obligatoire le signalement d’une personne exerçant une profession médicale dont l’état de santé risque de compromettre sa capacité à exercer ou de poser un risque pour la santé du public.
- L’ensemble des provinces et territoires ont adopté des lois qui exigent que vous signaliez les patientes et patients atteints de certaines maladies transmissibles.
- Dans les cas d’inconduite professionnelle de collègues, vous ou votre établissement pourriez avoir une obligation de signaler imposée par la loi dans certaines provinces et certains territoires et une obligation générale de le faire dans les autres.
- Il est important d’informer votre patiente ou patient exerçant une profession médicale de votre décision de déposer un rapport.
- Songez à orienter les collègues exerçant une profession médicale vers un programme d’aide aux fins d’évaluation et de traitement de tout problème médical, de santé mentale, de toxicomanie ou de comportement.
Étude de cas
Une médecin du Manitoba souffrant d’une dépendance à l’alcool a parfois des tremblements et des évanouissements. Elle se fait traiter par son médecin de famille. De plus en plus préoccupé par la capacité de sa patiente exerçant une profession médicale à travailler, le médecin de famille lui suggère de cesser de voir ses patientes et patients jusqu’à ce qu’elle obtienne le traitement nécessaire. En dépit de cette suggestion, elle continue d’exercer la médecine, affirmant qu’elle ne boit pas et ne prend aucune drogue avant de se présenter au travail.
La Loi sur les professions de la santé réglementées du Manitoba exige que les médecins responsables des soins déposent un rapport auprès du Collège en présence de motifs raisonnables de croire qu’une ou un autre médecin est inapte à exercer sa profession ou a une maladie pouvant amoindrir son aptitude à exercer sa profession, mais continue à exercer même si on lui a déconseillé de le faire.
Le cas échéant, le médecin de famille doit évaluer si la personne sous ses soins, qui exerce une profession médicale, peut s’acquitter de ses tâches cliniques de façon appropriée, même si elle ne boit pas et ne prend aucune drogue avant de voir des patientes ou des patients. Si les risques d’évanouissements, de tremblements ou d’erreurs de jugement persistent, il existe une obligation de signaler. En pareil cas, le médecin de famille devrait informer la personne de l’obligation de déposer un rapport auprès du Collège, ce qui devrait être fait le plus tôt possible.
Obligations en matière de signalement
Vous devriez vous familiariser avec les dispositions législatives et/ou les politiques du Collège en matière de signalement dans votre province ou territoire. De façon générale, les exigences et les attentes en matière de signalement sont affichées sur le site web du Collège en question. Il pourrait être pertinent de communiquer avec les médecins-conseils de l’ACPM pour obtenir de l’information et revoir vos obligations en matière de signalement. La plupart des lois ou politiques exigent que vous ayez des motifs raisonnables de signalement; cependant, les critères peuvent varier de manière importante selon le Collège. Bien qu’ils soient fréquemment utilisés, les termes comme incompétence, incapacité ou inaptitude ne sont généralement pas définis dans la loi ou le document de politique applicable.
Il est possible que vous ayez l’obligation de déposer un rapport auprès des établissements de santé, des hôpitaux, des responsables de la santé publique ou des Collèges. Un hôpital ou établissement qui restreint, suspend ou annule les privilèges d’exercice d’une ou un médecin (ou d’une autre personne exerçant une profession médicale) peut être tenu d’en informer le Collège.
Si vous avez des incertitudes par rapport à vos obligations en matière de signalement, communiquez avec l’ACPM pour obtenir des conseils.
Obtenir de l’aide
L’ACPM encourage les médecins à s’occuper de leur santé personnelle. Cela est particulièrement important lorsqu’elles et ils sont confrontés à un stress lié à des problèmes médico-légaux.
Des programmes de santé et de mieux-être des médecins sont accessibles partout au pays. Des études ont révélé qu’ils peuvent apporter une aide concrète aux médecins et leur permettre de reprendre l’exercice de la profession. Les médecins peuvent communiquer directement avec un tel programme pour obtenir de l’aide ou pour y diriger des collègues.
De façon générale, les règles en matière de confidentialité associées aux programmes d’aide aux médecins assurent un refuge où il est possible d’obtenir assistance et traitement d’une façon qui ne menace pas leur situation professionnelle. Dans des situations précises, ces programmes peuvent avoir une obligation de déposer un rapport auprès du Collège. On encourage les médecins qui envisagent un traitement auprès d’un tel programme à passer en revue les obligations des programmes d’aide aux médecins en matière de signalement.
Préoccupations liées à une personne sous vos soins qui exerce une profession médicale
Au Québec, des considérations particulières concernant la confidentialité des patientes et patients peuvent s’appliquer. Les membres qui ont des doutes sur leurs obligations en matière de signalement peuvent consulter l’ACPM.
Maladies transmissibles : Toutes les provinces et tous les territoires disposent de lois de santé publique obligeant les médecins à signaler aux responsables de la santé publique les personnes traitées atteintes de certaines maladies transmissibles (p. ex. VIH ou hépatite). Si une personne sous vos soins exerce une profession médicale et reçoit un diagnostic d’une maladie à déclaration obligatoire, vous devez le signaler à la personne ou au bureau désigné par la loi. Dans certaines provinces et certains territoires, les médecins peuvent également avoir l’obligation de signaler à leur Collège des collègues qui souffrent de certaines maladies transmissibles – même s’il s’agit de médecins qui consultent en tant que patientes ou patients (par exemple, en Colombie-Britannique et au Manitoba).
Santé : À titre de médecin responsable des soins, il se peut que vous ayez une obligation légale ou un devoir déontologique de signaler à l’organisme de réglementation concerné l’état de santé de personnes traitées exerçant une profession médicale lorsque cet état peut raisonnablement nuire à leur capacité d’exercer ou lorsque cet état peut menacer la sécurité des personnes qui consultent, du personnel ou d’autres personnes.
Cela peut se produire lorsque la personne refuse de suivre les traitements recommandés et raisonnables tels la prise de médicaments, l’observance de mesures de sécurité ou la prise d’un congé nécessaire. Il se peut que vous soyez confronté·e à un dilemme entre votre devoir de confidentialité à titre de médecin responsable des soins et l’impératif de protéger le public. La sécurité du public doit généralement primer.
Allégation d’inconduite sexuelle : Plusieurs provinces et territoires se sont dotés de dispositions légales ou de politiques de Collèges précises qui exigent le signalement de certains comportements tels une inconduite sexuelle présumée de la part d’une personne exerçant une profession médicale envers une personne sous ses soins. Cette obligation survient le plus souvent lorsque vous avez des motifs raisonnables, en fonction de renseignements que vous avez obtenus dans le cadre de votre pratique, de croire qu’une autre personne exerçant une profession médicale (sous vos soins ou collègue) a abusé sexuellement de personnes sous ses soins.
Préoccupations liées à une ou un collègue qui exerce une profession médicale et qui n’est pas sous vos soins
Compétence clinique : Des circonstances rares peuvent se présenter où, pour des motifs de sécurité des patientes et patients, vous sentez qu’il est nécessaire d’exprimer vos inquiétudes au sujet des habitudes de pratique, de la santé ou du comportement d’une ou d’un collègue.
Dans un hôpital ou un établissement, vous devriez exprimer vos préoccupations par la voie administrative appropriée. Au sein d’une culture juste en matière de sécurité, la direction déterminerait d’une façon équitable s’il y a une lacune au niveau des connaissances ou des habiletés de la personne, ou si une évaluation médicale est indiquée. L’approche privilégiée consiste à offrir de la formation et du soutien.
Comportement perturbateur : Les médecins ont une responsabilité de signaler la conduite et le comportement non professionnel d’autres personnes exerçant une profession médicale à une personne compétente au sein d’un établissement ou d’un hôpital, normalement la personne responsable du service.
De façon générale, les établissements et les hôpitaux sont tenus par la loi d’aborder les comportements perturbateurs en milieu de travail. Le fait d’orienter la personne vers un programme d’aide en vue d’une évaluation et d’un traitement contribue souvent à la résolution du comportement perturbateur. Si un comportement perturbateur nuit à la sécurité des patientes et patients ou si les facultés d’une personne exerçant une profession médicale sont affaiblies, il se peut que vous ayez ou que l’établissement ait une obligation de le signaler au Collège.
Dépôt du rapport
Lorsque vous déterminez que vous avez une obligation légale ou un devoir déontologique de déposer un rapport auprès d’un établissement, d’un hôpital, d’un Collège ou de responsables de la santé publique, dans la majorité des cas il est préférable d’informer la personne exerçant une profession médicale au préalable que vous avec l’obligation de déposer un rapport. Le rapport devrait être rédigé en temps opportun, ou immédiatement si la sécurité des patientes et patients est à risque. Bien que la personne exerçant une profession médicale puisse vouloir continuer à exercer, la ou le médecin qui dépose un rapport doit tenir compte de la sécurité de la communauté et du mieux-être de la personne faisant l’objet du rapport. Il est possible que l’on conseille à cette dernière de ne pas exercer dans l’intérim.
Réduction du stress associé au signalement
Le rapport en soi, ainsi que vos inquiétudes liées à l’aptitude à exercer ou au comportement perturbateur d’une ou d’un collègue, peuvent s’avérer particulièrement stressants pour toutes les parties impliquées. Reconnaissant que le signalement est difficile, il est important d’informer votre collègue des motifs du dépôt d’un rapport. De façon générale, le fait d’éviter les surprises, d’offrir un soutien et de faire preuve d’empathie contribue à réduire la tension.
Responsabilité
Le fait de savoir qu’une personne exerçant une profession médicale devrait faire l’objet d’un signalement, et d’omettre de le faire peut mener à l’intentement de procédures disciplinaires contre vous par l’établissement de santé, l’hôpital ou le Collège. Cela pourrait aussi entraîner une action en justice, notamment si une personne est présumée avoir subi un préjudice en raison de l’incapacité, de l’état de santé ou du comportement non signalé d’une personne exerçant une profession médicale.
Bien que la décision de signaler puisse vous causer un stress considérable, cela peut vous rassurer de savoir que des dispositions législatives et le droit civil/la common law vous protègent en matière de responsabilité en pareille circonstance. En règle générale, cette protection interdit une action en justice contre les médecins qui effectuent un signalement lorsque leur rapport repose sur des motifs raisonnables et qu’il est déposé de bonne foi.
Consignation des renseignements pertinents
Il est recommandé de consigner en détail tout renseignement pertinent qui mène au dépôt d’un rapport. Votre documentation devrait faire état du résultat de toute discussion avec la personne sous vos soins qui exerce une profession médicale ou la ou le collègue faisant l’objet du rapport. Des notes contemporaines (c.-à-d., des notes rédigées au moment de la rencontre ou dès que possible après celle-ci) peuvent s’avérer utiles s’il est allégué que le rapport n’a pas été déposé de bonne foi ou qu’il ne repose pas sur des motifs raisonnables. Toute divulgation de renseignements sur les patientes et patients (mêmes lorsqu’ils concernent une autre personne exerçant une profession médicale) devrait être consignée au dossier médical de la personne.
Auto-déclaration par les professionnels de la santé
Si une personne exerçant une profession médicale fait l’objet d’un traitement pour un problème de santé grave, elle doit également déterminer si elle est tenue d’effectuer une auto-déclaration conformément à toute loi ou politique applicable du Collège. Dans les formulaires de demande ou de renouvellement du permis, certains organismes de réglementation prévoient des questions portant sur la dépendance à l’alcool ou à d’autres drogues, les maladies infectieuses et tout état de santé physique ou mentale qui puissent nuire à l’aptitude à exercer en toute sécurité.