Les gens ont le droit de décider s’ils consentent aux investigations et aux traitements. C’est donc dire que les prestataires de soins ne peuvent procéder à aucune forme d’investigation ou de traitement médical sans avoir obtenu un consentement valide ou une ordonnance d’un tribunal, sauf dans les cas d’urgence où il n’est pas possible de l’obtenir.
Le consentement est valide lorsqu’il est donné par une personne ayant la capacité ou l’aptitude mentale nécessaire. Dans le cas d’une personne adulte (au Québec, d’une personne de plus de 14 ans) dont l’état mental est altéré, des questions surgissent quant à son aptitude à consentir.
Déterminer l’aptitude à consentir
Il existe une présomption en droit à l’effet qu’une personne est apte à consentir à une investigation et à un traitement à moins qu’il y ait des motifs raisonnables de croire autrement. Les personnes atteintes de troubles mentaux ou de déficiences intellectuelles peuvent néanmoins être aptes à donner leur consentement.
Des critères juridiques établis permettent de déterminer si une personne est apte à consentir. Dans certaines provinces et dans certains territoires, ces critères ont été élaborés par les tribunaux. Dans d’autres provinces et territoires, le critère visant à déterminer l’aptitude à consentir est établi par la loi. Bien que la terminologie propre à ces critères juridiques soit parfois différente, une personne capable de comprendre la nature et les effets prévus d’une investigation proposée ou d’un traitement médical et des solutions de rechange, et de saisir les conséquences d’un refus de traitement, est jugée apte à donner un consentement valide. L’incapacité pouvant être temporaire, il peut s’avérer nécessaire de réévaluer l’aptitude à consentir à intervalles appropriés.
En discutant d’une intervention avec une personne atteinte d’un trouble mental ou d’une déficience intellectuelle, il serait prudent de tenir compte des déficiences possibles aux niveaux du langage, de la mémoire ou de l’attention qui risquent de compromettre son aptitude à comprendre l’information qui lui est transmise. Il se peut que, dans une situation non urgente, les médecins souhaitent obtenir un deuxième avis de la part de collègues quand l’aptitude nécessaire à consentir d’une personne est remise en question.
Il serait sage que les médecins consignent au dossier médical les raisons permettant de conclure à l’inaptitude d’une personne à consentir. Cela peut inclure certains éléments du test applicable pour juger de l’aptitude, les dates et les résultats de toute évaluation de l’aptitude et toute deuxième opinion obtenue.
Le défaut d’obtenir un consentement approprié avant une investigation ou l’administration d’un traitement dans des situations non urgentes peut avoir des implications juridiques importantes pour les médecins, y compris la possibilité d’une plainte à l’organisme de réglementation de la médecine (Collège) ou une action en responsabilité civile alléguant un acte de violence ou une faute professionnelle. Des notes détaillées dans le dossier médical peuvent servir de preuve solide à l’effet que les médecins ont pris un soin raisonnable pour évaluer l’aptitude à consentir dans un cas particulier.
Consentement au nom d’autrui
Dans le cas où il a été démontré qu’une personne est inapte à consentir à une investigation et à un traitement médical particulier, la prochaine question pour les médecins responsables est de savoir qui est autorisé à prendre la décision pour elle.
La majorité des provinces et des territoires ont adopté des lois permettant d’obtenir un consentement au nom d’autrui lorsqu’une personne est jugée inapte. Généralement, ces lois établissent, par ordre de priorité, une liste de personnes autorisées à donner ou à refuser le consentement à un traitement au nom d’une personne inapte. Il faut d’abord respecter la priorité de rang et obtenir le consentement au nom d’autrui de la première personne en tête de liste, habituellement, la conjointe ou le conjoint de la personne soignée, un parent ou les enfants. Si la personne n’a pas de famille immédiate, ou si la personne en tête de liste n’est pas facilement disponible ou ne veut pas prendre de décision dans le temps requis, le consentement au nom d’autrui peut être obtenu de la prochaine personne disponible, en respectant toujours la priorité de rang. Il est important que les médecins connaissent tous les critères propres au consentement au nom d’autrui dans leur province ou territoire particulier.
En l’absence de loi sur le consentement au nom d’autrui (c.-à-d., au Nunavut, dans les Territoires du Nord-Ouest, au Manitoba et au Nouveau-Brunswick) et lorsqu’une personne n’a pas de directives préalables valides sur le traitement en question, seul le tribunal ou une personne nommée par le tribunal peut, à proprement parler, accepter ou refuser un traitement médical en son nom. Toutefois, en pratique, lorsque de toute évidence une investigation et un traitement rapides sont requis et qu’il y a consensus à l’effet que les soins recommandés sont dans l’intérêt de la personne, la majorité des médecins procéderont avec l’approbation de la famille.
Il est préférable de résoudre à l’amiable les problèmes concernant l’aptitude à consentir en amorçant des discussions avec la personne soignée et la famille. Si le désaccord persiste entre les membres de la famille, ou si l’investigation ou le traitement comporte des risques importants, on encourage les membres de l’ACPM à demander un avis juridique préalable et en temps opportun auprès de l’Association.
Consentement à l’aide médicale à mourir
L’aide médicale à mourir est autorisée par la loi au Canada, pourvu que les critères d’admissibilité et les mesures de sauvegarde soient respectés. Les décideuses ou décideurs remplaçants ne peuvent consentir à l’aide médicale à mourir au nom d’une personne inapte.
Dans certaines circonstances particulières, une personne peut renoncer à l’exigence selon laquelle elle doit confirmer son consentement à l’aide médicale à mourir au moment de la recevoir. Les personnes qui satisfont à tous les critères d’admissibilité et à toutes les mesures de sauvegarde en ce qui concerne l’aide médicale à mourir et chez qui la mort naturelle est raisonnablement prévisible peuvent conclure une entente écrite préalable de renonciation au consentement final avec leur médecin ou infirmière praticienne avant de devenir inaptes à consentir. Une telle entente préalable sera invalidée si, par la suite, la personne en question refuse de vive voix l’aide médicale à mourir ou manifeste par des paroles, sons ou gestes une résistance à recevoir celle-ci.
Il faut faire la distinction entre la renonciation au consentement final et une demande anticipée. Une demande anticipée est une disposition qui est prise par une personne qui ne souhaite pas obtenir dès maintenant l’aide médicale à mourir ou qui n’y est pas encore admissible. La demande s’applique aux circonstances futures dans lesquelles une personne aimerait recevoir l’aide médicale à mourir si elle est incapable de la demander ou d’y consentir. Les demandes anticipées ne sont pas permises en vertu des lois fédérales et provinciales existantes, sauf au Québec. En effet, depuis le 30 octobre 2024, la Loi concernant les soins de fin de vie du Québec autorise les demandes anticipées d’aide médicale à mourir dans certaines circonstances. Comme le Code criminel du Canada les interdit, des considérations particulières s’appliquent au Québec. Dans cette province, les médecins qui ont l’intention d’accepter les demandes anticipées d’aide médicale à mourir devraient communiquer avec l’ACPM pour obtenir des conseils pertinents et liés aux circonstances individuelles de chaque instance.
Problèmes concernant l’aptitude
Dans chaque province et dans chaque territoire, il existe des processus judiciaires permettant à une personne soignée ou à celle qui la représente de contester un résultat clinique déterminant que la personne soignée est inapte à consentir.
Dans la majorité des provinces et des territoires, une requête doit être présentée devant les tribunaux en vue de régler les problèmes concernant l’aptitude à consentir. Certaines provinces ont des tribunaux spécialisés communément appelés « commissions du consentement et de la capacité » leur permettant de procéder à de telles déterminations. Les membres de l’ACPM qui ont des questions médico-légales concernant ces problèmes devraient communiquer avec l’Association pour obtenir des conseils.
De façon générale, la loi exige que les décideuses ou décideurs remplaçants agissent selon la volonté exprimée par la personne soignée lorsqu’elle était apte (y compris dans des directives préalables, des volontés exprimées verbalement, etc.). Certaines lois précisent que si ces volontés ne sont pas connues, la décideuse ou le décideur remplaçant doit agir dans l’intérêt de la personne soignée. Les valeurs et les croyances de cette dernière peuvent également devoir être prises en considération.
Il peut arriver que des médecins soient en désaccord avec le choix de traitement des décideuses ou décideurs remplaçants. Dans un premier temps, il peut s’avérer utile de consulter d’autres médecins ou des juristes. Il peut être bon également de discuter avec un conseil d’éthique ou un spécialiste en éthique pour tenter de résoudre le désaccord de façon harmonieuse. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue qu’un bon nombre de ces conseils d’éthique et spécialistes en éthique pourraient ne pas souhaiter rendre une décision finale et plutôt tenter de faciliter le dialogue entre les parties.
On encourage les membres à communiquer avec l’ACPM dans les plus brefs délais en cas d’enjeu complexe lié au consentement ou à l’aptitude à consentir ou, encore, pour savoir vers quelles ressources se tourner en cas de désaccord avec les décideuses ou décideurs remplaçants ou entre les membres de la famille.