■ Obligations et responsabilités :

Les attentes vis-à-vis des médecins

Le recours à la photographie et à la vidéo médicales à des fins éducatives

Une dermatologue inspecte le dos d’une patiente à l’aide d’une caméra de dermoscopie

6 minutes

Publié : mars 2011 /
Révisé : juillet 2023

Les renseignements présentés dans cet article étaient exacts au moment de la publication

En bref :

  • Quand ils souhaitent utiliser des photos et des vidéos médicales à des fins éducatives ou promotionnelles, les médecins devraient obtenir le consentement explicite des patients au préalable. Pour ce faire, ils peuvent recourir à un formulaire de consentement.
  • Pour protéger la confidentialité des renseignements personnels des patients, il y a lieu de supprimer toute information identificatoire. Les médecins qui exercent dans un hôpital ou un autre établissement doivent tenir compte des politiques organisationnelles en vigueur.

Les médecins ont parfois recours à la photo ou à la vidéo pour rendre compte de la présence et de l’évolution d’une maladie; ils peuvent aussi s’en servir pour instruire le personnel soignant et les patients. Or, à moins d’avoir déjà discuté de la question avec leur médecin, les patients ne s’attendent pas nécessairement à ce que leurs photos ou vidéos médicales soient utilisées pour autre chose que leur prise en charge. Dans cet article, les médecins trouveront des conseils sur la façon d’utiliser ces photos et vidéos de manière responsable.

Les obligations des médecins

Les photos et les vidéos de patients doivent généralement être traitées comme des renseignements personnels sur leur santé, à plus forte raison si elles montrent des parties intimes du corps ou des éléments identificatoires (tache de naissance, bague, visage ou caractéristique particulière de l’anatomie).

Les exigences relatives au consentement

Habituellement, le consentement implicite des patients suffit pour recueillir, utiliser ou divulguer des renseignements personnels sur la santé en vue d’assurer la prise en charge à l’intérieur du cercle de soins; pour surveiller l’évolution d’une maladie ou vérifier des nævus, par exemple. Toutefois, certains Collèges exigent des médecins qu’ils obtiennent un consentement explicite avant de prendre des photos ou d’enregistrer des vidéos d’une patiente ou d’un patient, même s’ils le font dans le cadre de sa prise en charge.

Il y a également lieu d’obtenir le consentement explicite des patients quand on communique leurs renseignements personnels pour d’autres motifs que la prestation de soins (p. ex. à des fins éducatives ou promotionnelles). Les médecins ont donc avantage à aborder le sujet en amont avec leurs patients : ils devraient obtenir leur consentement à la prise de photos ou l’enregistrement de vidéos en leur expliquant comment celles-ci seront utilisées et protégées.

Quels points devraient être abordés avec les patients en vue d’obtenir leur consentement éclairé à l’utilisation de photos ou de vidéos à des fins éducatives?

Si vous avez l’intention d’utiliser des photos ou des vidéos médicales d’une personne sous vos soins, en particulier à des fins éducatives, vous devriez envisager de discuter avec elle des sujets suivants :

  • les motifs de la prise de photos ou de l’enregistrement de vidéos
  • ce qui sera photographié ou enregistré
  • la possibilité d’identifier la patiente ou le patient
  • les objectifs ou les applications possibles
  • les personnes qui pourraient avoir un droit d’accès aux photos ou aux vidéos (et le cas échéant, dans quel contexte)
  • le droit de la patiente ou du patient de refuser, de retirer ou de modifier son consentement

Les patients ne doivent pas se sentir obligés de consentir, et la discussion en vue d’obtenir le consentement doit être consignée dans le dossier médical.

Le fait qu’un programme éducatif soit publiquement accessible change-t-il la forme du consentement explicite?

Il est important de dire aux patients où les photos ou les vidéos pourraient être publiées. Par exemple, si une clinique envisage de faire paraître les images sur son site web ou dans les médias sociaux, les patients doivent en être informés. Il faut aussi garder en tête que de nombreuses revues scientifiques et programmes éducatifs sont accessibles en ligne.

Attention aux identificateurs personnels

Lorsque des patients acceptent qu’une photo ou une vidéo anonyme soit utilisée à des fins éducatives, il est important de retirer tout identificateur afin de protéger leur droit à la confidentialité. Le nom des patients doit être retiré (pensez aussi à supprimer les éléments identificatoires associés à la photo numérique ou à la vidéo, tel le nom utilisé pour sauvegarder le fichier électronique), tout comme les autres renseignements personnels (âge, sexe, antécédents médicaux, etc.).

Est-il nécessaire d’obtenir une autorisation écrite (à l’aide par exemple d’un formulaire de consentement signé devant témoin)?

La plupart des lois sur la protection des renseignements personnels ne stipulent pas comment le consentement explicite doit être obtenu. Cela dit, au moins une province et un territoire exigent, sauf exception, qu’il soit obtenu par écrit. Il est toujours plus prudent de demander aux patients de remplir un formulaire d’autorisation : n’hésitez pas à utiliser un modèle de formulaire de consentement [PDF] dans votre pratique en le personnalisant.

Il importe d’insister sur le fait qu’un formulaire ne constitue pas à lui seul un consentement. Avant de demander à un patient ou une patiente de remplir le document en question, vous devriez lui expliquer quel type de photo ou de vidéo sera réalisé et comment vous prévoyez vous en servir; la personne doit aussi avoir consenti à ce que la photo ou la vidéo soit utilisée et divulguée aux fins mentionnées.

Le formulaire de consentement doit faire mention des divers usages possibles; il doit par exemple énoncer en détail la nature des photos ou des vidéos et énumérer les objectifs de leur utilisation et de leur divulgation subséquentes.

Au moment d’obtenir le consentement explicite, verbalement ou par écrit, vous devriez consigner au dossier médical la discussion entourant le consentement. Si vous avez obtenu un formulaire signé, une copie doit aussi se retrouver au dossier.

Appareils et stockage de fichiers

Les appareils électroniques personnels sont pratiques, certes, mais il est généralement préférable d’éviter de s’en servir pour prendre des photos ou enregistrer des vidéos de patients. Dès que les photos ou les vidéos ont été téléversées à l’endroit voulu (p. ex. le dossier médical), prenez soin de les supprimer de façon permanente de l’appareil que vous avez utilisé pour les prendre ou les enregistrer. De même, évitez de laisser traîner inutilement des copies ou d’autres versions de ces images sur un appareil électronique (p. ex. cellulaire, ordinateur portable, disque dur externe, clé USB). Veillez enfin à ce que tous les appareils de stockage de photos et de vidéos que vous utilisez soient dotés d’un logiciel de chiffrement.

Peut-on utiliser des photos ou des vidéos datant d’un certain temps?

Il peut s’avérer difficile, voire impossible d’obtenir un consentement explicite en vue d’utiliser des photos médicales prises plusieurs années auparavant. Les lois sur la protection de la vie privée n’interdisent pas nécessairement l’usage continu de photos ou de vidéos médicales non identificatoires. Si toutefois il y a une possibilité raisonnable que le sujet de la photo ou de la vidéo soit identifié, il est préférable de s’abstenir d’utiliser le visuel en question, à moins de pouvoir obtenir le consentement explicite du sujet (ou de la personne qui le représente légalement s’il est décédé ou frappé d’incapacité mentale).

Cas – Article de revue spécialisée

Une patiente accepte qu’on prenne une photo médicale pour illustrer l’approche chirurgicale utilisée dans le traitement de son cancer du sein. Son visage et la cicatrice chirurgicale sur sa poitrine sont visibles sur l’image.

Le chirurgien est sollicité par une journaliste qui veut rédiger un article sur le cancer du sein pour une revue médicale. On remet quelques photos médicales à la journaliste en précisant que les yeux des patientes doivent être masqués pour préserver l’anonymat. La photo de cette patiente est publiée dans la revue médicale; des rectangles noirs cachent ses yeux.

La photo n’est jamais renvoyée au chirurgien. Quatre ans plus tard, elle est publiée dans une autre revue spécialisée, sans rectangles noirs. La patiente y est clairement identifiable.

L’ACPM a versé une compensation à la patiente au nom du chirurgien membre, une contribution égale ayant été versée par l’éditeur de la revue.

Cas – Brochure destinée au public

Une femme de 36 ans subit un traitement esthétique au visage. La patiente consent verbalement à ce que le médecin utilise des photos prises avant et après son intervention, mais seulement dans des contextes précis (c.-à-d. à des fins scientifiques, pour la recherche ou pour des présentations éducatives). Ce consentement verbal n’est pas consigné.

Le médecin donne les photos à une collègue de la clinique, sans préciser les restrictions quant à leur utilisation. Par la suite, la patiente apprend que ses photos ont été publiées dans une brochure destinée au public.

La patiente intente une action en justice et l’ACPM lui verse une compensation au nom du médecin membre.


AVIS : Les renseignements publiés dans le présent document sont destinés uniquement à des fins générales. Ils ne constituent pas des conseils professionnels spécifiques de nature médicale ou juridique, et n’ont pas pour objet d’établir une « norme de pratique » à l’intention des personnes exerçant une profession de la santé au Canada. L’emploi que vous faites des ressources éducatives de l’ACPM est visé par ce qui précède et l’avis de non-responsabilité de l’ACPM dans son intégralité, « Contrat d’utilisation de l’ACPM ».