Les stagiaires en médecine doivent pouvoir profiter d’expériences concrètes. Pour cette raison, les médecins sont souvent sollicités en vue de participer à leur formation. En assumant ce travail d’éducation, il leur faut faire face à la dualité de leur rôle : veiller à ce que les patientes et patients reçoivent les meilleurs soins possible, mais aussi offrir des expériences d’apprentissage aux stagiaires.
Ce double rôle entraîne des risques en matière de responsabilité professionnelle. Il est important pour les médecins superviseurs de bien comprendre ce qui leur incombe dans la prestation des soins, ainsi que les tâches pouvant être déléguées aux stagiaires sous leur supervision.
Supervision de stagiaires
Alors que les étudiantes et étudiants en médecine observent le travail des médecins et y participent, les résidentes et résidents acceptent davantage de responsabilités dans les soins. Les médecins superviseurs peuvent raisonnablement se fier aux résidentes et résidents pour exécuter les tâches qui leur sont dûment déléguées; cependant, il leur faut être sensibilisés aux circonstances exigeant une supervision plus étroite. Ceci peut dépendre de certains facteurs, dont l’état de la patiente ou du patient, la complexité de l’intervention, ainsi que l’expérience et les compétences de la résidente ou du résident. Les médecins qui supervisent des médecins diplômés à l’étranger (MDÉ) exerçant la médecine depuis peu au Canada et ayant suivi d’autres voies d’accès à la pratique devront aussi se familiariser avec les restrictions d’exercice pouvant être imposées aux MDÉ par l’organisme de réglementation de la médecine (Collège) de leur province ou territoire.
Les médecins superviseurs peuvent aussi être appelés à surveiller la formation de membres d’autres professions de la santé (p. ex. personnel paramédical et adjointes et adjoints aux médecins). Ces médecins pourraient ne pas bien connaître la formation et les compétences que l’on exige de ces professions; il importe donc d’aller chercher les renseignements nécessaires. Les médecins doivent déterminer le degré de supervision que requièrent les stagiaires en fonction de leur formation ou de leur compétence. Il est également nécessaire de confirmer que les stagiaires disposent d’une protection adéquate en matière de responsabilité professionnelle.
Les médecins qui supervisent des résidentes et résidents peuvent leur déléguer une partie de la formation ou de la supervision des étudiantes et étudiants en médecine. Cependant, cette délégation ne devrait se produire que si les médecins le jugent approprié, en prenant en compte les exigences du programme de formation, les habiletés et la formation des résidentes et résidents, les tâches à exécuter par les étudiantes et étudiants en médecine et les considérations en matière de sécurité des patients.
La délégation ne devrait se faire que dans des circonstances appropriées; chaque fois qu’il y a délégation, l’intérêt des patientes et patients doit prévaloir. L'évaluation par les médecins des compétences, des habiletés et de l’expérience des stagiaires déterminera si un acte peut être délégué. Par contre, il peut s’avérer difficile d’évaluer si les stagiaires possèdent la formation adéquate. Les médecins doivent donc faire preuve d’un bon jugement clinique pour déterminer si les stagiaires possèdent les compétences cliniques pour exécuter la tâche choisie.
Le défaut d’encadrer adéquatement des stagiaires ou le fait de leur déléguer des tâches inappropriées pourrait rendre les médecins superviseurs responsables d’un préjudice résultant des actes de ces personnes. En cas de procès, les tribunaux évalueront si les médecins chargés de la supervision ont respecté la norme de pratique dans la délégation de tâches aux stagiaires. Les tribunaux pourraient critiquer des médecins qui délèguent des tâches jugées au-delà de la formation et de l’expérience de stagiaires. Généralement, les tribunaux prendraient en compte le degré de soin et de compétence qu’une ou un médecin superviseur aurait raisonnablement appliqué dans des circonstances semblables. Cette démarche implique l’établissement des pratiques approuvées en vigueur, de même que tout changement ou toute percée dans les techniques de traitement et dans la technologie.
Les résidentes et résidents doivent respecter les normes de pratique en vigueur pour l’ensemble des médecins en résidence ayant la même formation et les mêmes compétences. Pour déterminer la norme de pratique, les tribunaux prendront en compte l’opinion des experts du champ d’exercice de la médecine correspondant et examineront les normes adoptées par les organisations de médecins spécialistes.
Obtention du consentement
Un consentement éclairé doit être obtenu avant la prestation de tout traitement non urgent. Les médecins superviseurs ainsi que les stagiaires devront clarifier qui est responsable d’obtenir le consentement. Cette tâche peut être déléguée aux résidentes et résidents qui disposent de l’expérience et des habiletés voulues pour fournir aux patientes et patients l’information nécessaire à la discussion entourant l’obtention du consentement éclairé.
Les médecins superviseurs devraient tenir compte des circonstances dans lesquelles il leur faut présenter des stagiaires et informer les patients que ces personnes participeront à leurs soins, en précisant l'étendue de cette participation. En outre, la discussion et le consentement doivent être consignés dans le dossier médical.
Norme de pratique
Les médecins responsables de la supervision devront se familiariser avec la norme de pratique que doivent respecter les stagiaires. Il leur faut aussi encourager les stagiaires à reconnaître leurs propres limites et à les respecter dans le cadre de leur travail. Les résidentes et résidents ne devraient pas accepter des tâches qui dépassent leur formation et leur expérience.
Le risque d’un résultat clinique défavorable peut être réduit au minimum lorsque les médecins superviseurs et les résidentes et résidents communiquent efficacement au sujet de la prestation des soins. De plus, des protocoles peuvent être établis, entre autres, pour aider les stagiaires à déterminer le genre de conseils à aller chercher auprès des médecins superviseurs.
Dans l’éventualité d’un litige, les médecins superviseurs devront démontrer avoir respecté une norme de pratique raisonnable qu’une ou un médecin prudent aurait suivie dans les mêmes circonstances. Les stagiaires seront tenus de respecter une norme de pratique appropriée à la situation, et à leur degré de formation et d'expérience. De plus, les médecins superviseurs pourraient être tenus responsables de tout préjudice découlant d’une faute professionnelle de stagiaire si les médecins ont délégué une tâche de façon inappropriée ou n’ont pas assuré une supervision adéquate pendant son exécution.
Obligations relatives à l’enseignement
Les médecins d’aujourd'hui ont une obligation professionnelle de contribuer à la formation des médecins de demain. Cependant, les compétences en enseignement ne sont pas nécessairement innées et doivent souvent être acquises. Les styles d’enseignement peuvent varier en fonction de la personne et de la culture.
La supervision de stagiaires et l’évaluation de leurs progrès peuvent parfois être compliquées par des problèmes de communication ou des malentendus. De tels problèmes peuvent entraîner des conflits ou des plaintes.
La sensibilisation et la capacité d’adaptation aux besoins éducatifs des stagiaires contribueront à l’établissement de comportements et de valeurs professionnelles chez les étudiantes et étudiants. Le fait de montrer de la réceptivité aux préoccupations soulevées par les stagiaires peut soutenir une communication efficace.
Il est important, pour les médecins qui enseignent, de rendre compte sans délai de leurs évaluations au programme de formation et de signaler toute préoccupation à l’égard du professionnalisme d’une ou d’un stagiaire.
Entre-temps, si des conflits ou des plaintes surviennent, les médecins superviseurs peuvent faire l'objet d’une plainte auprès de la direction du programme de formation ou de la commission des droits de la personne s’il y a eu allégations de discrimination. Les médecins superviseurs devraient communiquer avec la direction du programme ou avec l’ACPM pour obtenir des conseils en lien avec les circonstances.
Lignes directrices et politiques
Les médecins superviseurs, de même que les stagiaires, devraient connaître les politiques et les lignes directrices pertinentes adoptées par le Collège en regard de la délégation aux stagiaires et de leur supervision.
Les médecins superviseurs sont généralement admissibles à une assistance de l’ACPM dans le cadre de problèmes médico-légaux découlant de leur supervision de stagiaires ou de membres d’autres professions de la santé.
Points à retenir
- Les médecins superviseurs et les stagiaires devraient connaître les protocoles et les directives des hôpitaux, de même que les politiques et les lignes directrices du Collège sur la délégation et la supervision.
- Les médecins superviseurs devraient s'assurer que les stagiaires ont une protection adéquate en matière de responsabilité professionnelle.
- Les médecins superviseurs qui n’assurent pas une supervision adéquate des stagiaires pourraient s’exposer à des problèmes médico-légaux.
- Pour déterminer dans quelle mesure certaines tâches peuvent être déléguées à des stagiaires et quel niveau de supervision cela demande, les médecins doivent tenir compte, entre autres, du degré de formation, des compétences et de l’expérience des stagiaires, ainsi que de la tâche assignée et de la situation clinique. Les médecins superviseurs doivent assurer une certaine présence et voir la patiente ou le patient en compagnie de la ou du stagiaire, au besoin.
- Les médecins superviseurs doivent aussi sensibiliser les stagiaires aux situations dans lesquelles il est impératif que ces derniers communiquent avec eux au sujet d’un cas.
Le site web de l’ACPM contient des renseignements supplémentaires qui pourraient être utiles autant aux médecins superviseurs qu’aux stagiaires. En particulier, veuillez consulter la page « Médecin-équipe – Délégation et supervision : le travail des apprenants », Les bonnes pratiques de l’ACPM.
Les membres qui désirent recevoir des conseils ou davantage d’information au sujet de leurs rôles et responsabilités dans l’enseignement et la supervision des stagiaires ne devraient pas hésiter à communiquer avec l’ACPM.
Les facteurs à considérer qui sont présentés dans cette publication s’appliquent également au Québec où un règlement permet aux stagiaires d’accomplir des actes réservés, sous la supervision de médecins, durant leur formation médicale ou leur résidence.