■ Sécurité des soins :

Amélioration de la sécurité des patients et réduction des risques

Incidents liés à la sécurité des patients : comment les déclarer et participer à leur évaluation

Une discussion médecin-patient

9 minutes

Publié : mars 2010 /
Révisé : février 2022

Les renseignements présentés dans cet article étaient exacts au moment de la publication

Améliorer la sécurité des patients

Les experts dans le domaine de la sécurité des patients reconnaissent que pour réduire le nombre d’incidents liés à la sécurité des patients et améliorer la qualité des soins qui seront prodigués à l’avenir, il y a lieu de miser sur des mesures de protection systémiques. Le fait de blâmer le ou la prestataire des soins n’aura généralement aucun impact sur les facteurs ayant contribué à un incident lié à la sécurité des patients. Le problème risque en fait de se reproduire, sauf si on cherche réellement à comprendre les circonstances, le contexte de l’action et le processus décisionnel qui ont entouré l’événement.

Le défi est de trouver un juste équilibre entre deux éléments : l’amélioration des systèmes de soins pour aider à prévenir des événements semblables, et la résolution équitable et au cas par cas des problèmes de rendement et de responsabilisation chez les professionnels de la santé. Selon un grand nombre d’experts des soins de santé, le virage vers une approche plus équilibrée permet d’établir une culture « juste et équitable » de sécurité des patients.

Qu’est-ce qu’une culture juste en matière de sécurité?

Dans une culture juste en matière de sécurité, les dirigeants et tous les membres du personnel s’engagent à prodiguer aux patients les soins les plus sécuritaires possible. Cette culture repose sur un engagement commun à tirer des leçons des incidents liés à la sécurité des patients et des incidents évités de justesse afin d’apporter des améliorations. Tant les intérêts des patients que ceux des professionnels de la santé sont protégés.

Conseils sur les rapports d’incident/accident

La plupart des hôpitaux ont en place des politiques et un système de déclaration des incidents liés à la sécurité des patients et des incidents évités de justesse.

De façon générale, ces rapports d’incident ne sont pas considérés comme de l’information sur l’amélioration de la qualité et ne seront probablement pas protégés par les lois qui empêchent la divulgation de cette information dans les procédures juridiques, réglementaires ou autres. Les rapports d’incident/accident ne doivent pas être gardés dans le dossier médical, sauf en Ontario et au Québec où la loi exige qu’une copie soit conservée dans le dossier des patients à l’hôpital.1

Les rapports ne doivent contenir que les faits tirés du dossier médical. Dans une culture juste en matière de sécurité, il ne faut pas préjuger des raisons qui sous-tendent les résultats cliniques et les événements, et il faut se garder de blâmer quiconque de façon hâtive. Les rapports ne doivent donc pas jeter de blâme ni formuler d’hypothèses, d’opinions ou d’autres commentaires sur les raisons d’un événement; les recommandations sont également à éviter.

La déclaration des incidents liés à la sécurité des patients et des incidents évités de justesse est importante, certes, mais la façon dont ces rapports sont utilisés l’est tout autant.

Types dévaluation

En général, il y a deux types d’évaluation des incidents liés à la sécurité des patients qui devraient être utilisés par les dirigeants/gestionnaires dans les hôpitaux du Canada. Les médecins qui sont invités à participer à une évaluation devraient avant tout déterminer de quel type il s’agit. Les évaluations en matière d’amélioration de la qualité sont axées sur les problèmes systémiques, tandis que les évaluations de l’acte médical portent sur les soins prodigués par un ou une prestataire de soins de santé en particulier.

De façon générale, il y a tout lieu de débuter le processus par une évaluation en matière d’amélioration de la qualité. Une évaluation de l’acte médical ne devrait être mise en œuvre que lorsque l’on soupçonne qu’un incident lié à la sécurité des patients pourrait être attribuable au rendement d’un ou une prestataire de soins de santé. Il arrive qu’une telle évaluation mette au jour de graves préoccupations à l’égard du rendement ou de la conduite d’un membre du corps médical. Le cas échéant, il y a lieu de mettre l’évaluation en veilleuse ou de soumettre les problèmes liés à l’exécution de l’acte médical ainsi découverts à un processus distinct qui en permettra une analyse adéquate.

Évaluations en matière d’amélioration de la qualité

Les évaluations effectuées par des comités d’amélioration de la qualité2 servent à déterminer les raisons qui sous-tendent les incidents liés à la sécurité des patients ou les incidents évités de justesse par l’examen du système dans lequel les soins de santé sont prodigués.

Pour encourager la pleine participation des professionnels de la santé, chaque province ou territoire compte en général des lois qui protègent le travail des comités d’évaluation en matière d’amélioration de la qualité. À moins d’être expressément exclus d’une telle protection, les opinions et les documents rédigés par ou pour un tel comité ne peuvent être utilisés subséquemment dans des procédures judiciaires, réglementaires ou autres. Les patients devraient être informés des nouveaux faits relevés par l’analyse de l’incident; ils devraient aussi être avisés des conclusions (mais pas des opinions menant aux conclusions) concernant les raisons qui sous-tendent le résultat clinique. Bien qu’il soit également possible de communiquer les recommandations ayant été formulées en matière d’amélioration, ce n’est pas le cas pour les délibérations, les opinions et les hypothèses qui ont mené à ces recommandations. Des excuses peuvent être envisagées lorsque la situation s’y prête. Dans certaines provinces ou certains territoires, des lois imposent des exigences aux hôpitaux et aux autorités en matière de santé à l’égard des renseignements qui doivent être divulgués aux patients affectés.

L’ACPM favorise l’apprentissage en matière d’amélioration de la qualité : elle mise pour ce faire sur des évaluations bien structurées et menées adéquatement, auxquelles elle encourage ses membres à prendre part. La participation des professionnels de la santé à des évaluations d’incidents liés à la sécurité des patients peut être prescrite par la loi dans certaines provinces ou certains territoires ou dans les règlements des hôpitaux.

Le rôle du biais rétrospectif

Lors de l’examen du résultat clinique, tous les professionnels impliqués devraient contribuer à établir les faits, mais éviter de se blâmer eux-mêmes ou de blâmer autrui. Le fait de savoir qu’un résultat défavorable s’est produit renforce la croyance selon laquelle il était prévisible et, par conséquent, évitable. Ce « biais rétrospectif » alimente la perception qu’un résultat imprévu découle de l’insouciance ou de mauvais soins cliniques plutôt que du contexte ou des conditions précises dans lesquels le ou la prestataire de soins évoluait au moment de l’événement.

Évaluations de lacte médical

La direction ou les chefs de service d’un hôpital peuvent décider d’effectuer une évaluation de l’acte médical pour déterminer le rôle précis qu’a joué un ou une prestataire de soins de santé dans un incident lié à la sécurité des patients. Dans une culture juste en matière de sécurité, l’éducation et le soutien représentent des approches de prédilection lorsque des lacunes sont décelées dans la conduite des prestataires de soins. Il peut parfois être nécessaire d’avoir recours à des mesures disciplinaires ou à d’autres sanctions.

Les professionnels de la santé sont généralement obligés de participer aux évaluations de leur propre travail professionnel lorsqu’ils y sont invités. Les membres devraient communiquer avec l’ACPM pour obtenir des conseils à ce sujet.

Conseils généraux sur les incidents liés à la sécurité des patients

Communication avec les patients

Après un incident lié à la sécurité des patients, ces derniers ont des besoins de nature clinique, psychologique et informationnelle à combler. Répondre sans tarder à chacun de ces besoins constitue une priorité absolue lorsque survient un tel incident.

Déclaration à l’hôpital/l’établissement de santé 

  • Les médecins devraient connaître et suivre les politiques et les procédures concernant la déclaration des incidents liés à la sécurité des patients.
  • Les médecins devraient fournir uniquement de l’information factuelle dans les rapports d’incident/accident et s’abstenir de jeter un blâme ou de formuler des hypothèses, des opinions ou d’autres commentaires sur les raisons de l’événement.

Participation aux évaluations des incidents liés à la sécurité des patients en matière d’amélioration de la qualité 

  • Il y a lieu de s’informer pour savoir si le comité d’amélioration de la qualité de l’établissement est bien constitué en vertu de la loi pertinente et d’obtenir l’assurance que les évaluations en matière d’amélioration de la qualité seront menées sous le sceau de la confidentialité. Les médecins sont encouragés à participer pleinement aux évaluations systémiques d’amélioration de la qualité.
  • Il n’est pas toujours possible que l’ensemble des activités d’amélioration de la qualité soient chapeautées par un comité officiel dûment constitué à cette fin. Les avantages souvent associés à la participation à ces activités l’emportent sur le risque possible que l’information soit utilisée ou divulguée dans des actions judiciaires subséquentes.

Participation à une évaluation de l’acte médical concernant votre travail professionnel

  • Participez à l’évaluation, étant donné qu’il s’agit généralement d’une obligation.
  • Communiquez avec l’ACPM pour obtenir des conseils.
  • Tenez-vous-en aux faits et ne formulez pas d’hypothèses. 

Il y a lieu de communiquer avec l’ACPM pour obtenir des conseils si… 

  • Vous avez des incertitudes sur la façon de procéder.
  • Vous avez l’obligation de participer à une évaluation en matière d’amélioration de la qualité dont la structure ne répond pas aux paramètres établis dans la loi provinciale ou territoriale pertinente.
  • Vos privilèges sont menacés.
  • Un ou une médecin légiste ou le bureau du coroner demande de l’information issue d’une évaluation ou d’une procédure disciplinaire à laquelle vous avez pris part auprès d’un organisme de réglementation (Collège).
  • Vous avez reçu des menaces de litige ou vous êtes partie à un litige déjà en cours.

Les membres de l’ACPM sont encouragés à comprendre les différences entre une évaluation en matière d’amélioration de la qualité et une évaluation de l’acte médical, notamment en ce qui a trait à leur but ainsi qu’aux procédures, aux démarches d’analyse probables, aux mesures de protection de l’information et aux conséquences qui s’y rattachent.


Notes :

  1. Selon la loi au Québec, un incident évité de justesse est appelé un « incident » et un incident lié à la sécurité des patients, un « accident »; les deux sont définis de façon précise dans les textes de loi. La loi exige qu’un rapport soit rempli pour les incidents et les accidents dans les établissements gouvernementaux tels que les hôpitaux. Une copie du rapport est conservée dans le dossier médical de l’hôpital. En Ontario, la réglementation découlant de la Loi sur les hôpitaux publics exige qu’un rapport soit versé au dossier du patient ou de la patiente de l’hôpital lorsque cette personne connaît un « incident critique », lequel est défini comme étant « tout événement involontaire qui se produit alors qu’un malade suit un traitement à l’hôpital et qui : a) d’une part, entraîne le décès du malade ou une invalidité, une blessure ou un préjudice grave chez celui-ci; b) d’autre part, ne découle pas principalement de l’état de santé sous-jacent du malade ou d’un risque connu inhérent à l’administration du traitement » (R.R.O. 1990, Règl. 965 : GESTION HOSPITALIÈRE, en vertu de hôpitaux publics (Loi sur les), L.R.O. 1990, chap. P.40).
  2. Selon la province ou le territoire, les comités d’amélioration de la qualité peuvent porter d’autres noms, p. ex. comité de la qualité des soins, comité d’examen des incidents critiques, comité de la gestion des risques.

AVIS : Les renseignements publiés dans le présent document sont destinés uniquement à des fins générales. Ils ne constituent pas des conseils professionnels spécifiques de nature médicale ou juridique, et n’ont pas pour objet d’établir une « norme de pratique » à l’intention des personnes exerçant une profession de la santé au Canada. L’emploi que vous faites des ressources éducatives de l’ACPM est visé par ce qui précède et l’avis de non-responsabilité de l’ACPM dans son intégralité, « Contrat d’utilisation de l’ACPM ».