■ Sécurité des soins :

Amélioration de la sécurité des patients et réduction des risques

Pour un suivi efficace en pratique clinique

Un système robuste de suivi en huit étapes

Médecin assise à un bureau qui parle au téléphone

9 minutes

Publié : mars 2019

Les renseignements présentés dans cet article étaient exacts au moment de la publication

Lisez le scénario suivant et songez à ce qu’aurait permis un meilleur suivi.

Un homme de 53 ans consulte une chirurgienne générale pour une coloscopie; la recherche de sang occulte dans les selles s’est révélée positive et le taux d’hémoglobine est de 72 g/L. La chirurgienne éprouve beaucoup de difficulté à effectuer la coloscopie et l’examen prend fin sans qu’elle puisse visualiser l’intégralité du côlon. Elle prescrit une colographie par tomodensitométrie pour écarter la présence d’une tumeur. Malheureusement, la demande d’examen est perdue et le patient ne subit jamais cette intervention. Des mois plus tard, il retourne à l’urgence en raison de symptômes d’occlusion intestinale; une intervention est pratiquée et révèle une importante tumeur occlusive. Malgré le traitement, le patient décède et sa famille intente une action en justice alléguant une faute professionnelle dans l’établissement du diagnostic attribuable à l’absence de suivi de l’examen prescrit par la chirurgienne.

Suivi = obligation professionnelle

De nombreux facteurs peuvent mener à un retard dans l’établissement du diagnostic; p. ex. oublier d’aviser un patient d’un résultat d’examen. Les médecins peuvent atténuer la probabilité de tels retards en ciblant leurs efforts sur l’amélioration de leur système de suivi des examens de laboratoire, ainsi que des demandes d’imagerie diagnostique et de consultation.

De nombreux organismes provinciaux et territoriaux de réglementation (Collèges) ont des politiques qui établissent leurs attentes envers les médecins en matière de suivi des demandes d’examen, d’imagerie et de consultation, et de leurs résultats. En effet, le fait de disposer d’un système raisonnable pour l’atteinte de cet objectif constitue une obligation professionnelle pour les médecins. Bien que certains types d’examen soient assujettis à des programmes établis de suivi (p. ex. frottis de Pap, recherche de sang occulte dans les selles, mammographie), la responsabilité du suivi incombe au médecin prescripteur dans la plupart des autres cas.

Vers un système fiable de suivi : Premières étapes

Bien que la mise en œuvre ou l’amélioration d’un système de suivi puisse sembler ardue, le système en tant que tel n’a pas à être complexe : il doit être suffisamment robuste pour faire en sorte que les demandes et les résultats d’examen puissent être revus, et que l’on puisse y donner suite dans un délai raisonnable.

Commencez par l’analyse de votre pratique. Déterminez les examens que vous prescrivez habituellement et dont la mauvaise gestion pourrait fort probablement donner lieu à un préjudice. Par exemple, si vous demandez régulièrement des examens visant à déterminer la malignité de tumeurs (radiographie des poumons, tomodensitométrie, échographie, mammographie, antigène spécifique de la prostate) ou des coagulopathies (hémogramme, ratio international normalisé [RIN]), vous pourriez centrer vos efforts initiaux sur la mise sur pied ou l’amélioration d’un système structuré axé sur ces types d’examen.

N’arrêtez pas d’améliorer vos processus dès que vous remportez un premier succès : l’amélioration continue est essentielle à la fiabilité d’un système. Lorsque vous cernez une problématique, utilisez une approche concertée avec les autres participants au processus d’examen (p. ex. infirmières, personnel de réception, personnel de laboratoire et médecins consultants) pour en arriver à une solution consensuelle.

Apprendre à connaître la fonction de suivi des examens de votre DME

Si vous disposez d’un système de dossier médical électronique (DME), ce dernier figure probablement parmi vos meilleurs outils pour la création d’un système fiable de suivi. De nombreux DME comptent d’efficaces fonctions intégrées de suivi. Savez-vous comment tirer parti de celles de votre DME? Votre fournisseur de DME pourrait peut-être vous aider. Votre association ou fédération médicale provinciale ou territoriale pourrait également vous offrir du soutien à ce chapitre. Par exemple, OntarioMD (www.ontariomd.ca) offre un service de soutien de collègues visant à aider les médecins à tirer le maximum des caractéristiques de leur DME.

Système de suivi : étapes suggérées

Une analyse des dossiers médico-légaux de l’ACPM en médecine familiale dans le cadre desquels un problème de suivi a contribué à un incident lié à la sécurité du patient a révélé que plus de la moitié (60 %) de ces dossiers mettaient en cause une carence dans l’une des étapes du processus de suivi, tandis que les autres (40 %) étaient associés à des carences affectant de multiples étapes.

Le diagramme suivant, adapté de l’Agency for Healthcare Research and Quality (AHRQ) américaine, définit le processus de suivi des résultats d’examen comme une série d’étapes.1 Les améliorations apportées à l’une ou à plusieurs de ces étapes peuvent atténuer le risque d’échec. Un système fiable de suivi compte des mesures de sauvegarde à chacune de ses étapes, de façon à assurer la redondance de la protection. Lorsque l’une des étapes échoue, le processus compte une étape en aval pouvant, idéalement, redresser la situation.

Pour chacune de ces étapes, nous décrivons un problème possible, pour ensuite suggérer des solutions.

  1. L’examen est prescrit
    Problème :
    Certains examens sont prescrits incorrectement ou inutilement. Les demandes sont mal étiquetées, ou le médecin ne se souvient plus d’avoir prescrit l’examen ou pour quelle raison il l’avait demandé.
    Solutions suggérées :
    • Ne prescrivez que les examens pertinents et nécessaires.2
    • Minimisez la variabilité en utilisant le même processus de demande pour un type d’examen donné.
    • Avant de prescrire quelque examen que ce soit, apprenez à votre personnel à confirmer au moment de l’accueil les coordonnées du patient et de la personne à joindre en cas d’urgence
    • En clinique, utilisez un système qui exige que chaque médecin prescripteur utilise la bonne demande.
  2. L’examen est effectué
    Problème :
    Certains patients négligent de se présenter à leur examen ou doivent faire face à un long temps d’attente entre la demande et l’exécution de l’examen.
    Solutions suggérées :
    • Établissez une date limite raisonnable d’ici laquelle vous souhaitez recevoir les résultats, en tenant compte du contexte de votre pratique. Communiquez avec les patients dont les résultats n’ont pas été reçus à cette date pour leur rappeler de subir l’examen.
    • Favorisez la participation des patients à la gestion de leur santé et au suivi de leurs examens. Expliquez-leur l’importance de l’examen et demandez-leur de vous confirmer leur compréhension.
  3. Les résultats sont générés et suivis
    Problème :
    Certains résultats d’examen cruciaux ne reçoivent pas l’attention requise.
    Solutions suggérées :
    • Consultants : Inscrivez clairement la mention « RÉSULTAT ANORMAL » ou « AVERTISSEMENT – CONSTATATION INATTENDUE » dans la partie supérieure de tout document indiquant des résultats anormaux ou inattendus.
    • Avisez verbalement le médecin prescripteur de tout résultat crucial ou inattendu.
    • Si vous recevez un résultat anormal pour un examen que vous n’avez pas prescrit, cherchez à identifier le médecin le plus responsable (qui devrait y donner suite) et déterminez s’il y a lieu d’aviser les autres médecins du cercle de soins.
  4. Les résultats sont transmis
    Problème :
    Certains résultats d’examen ne sont pas communiqués au médecin prescripteur.
    Solutions suggérées :
    • Configurez un rappel électronique (dans votre DME ou calendrier) pour ne pas oublier de confirmer la réception d’un résultat en attente d’ici une date prédéterminée.
    • Avisez vos patients qu’ils recevront un appel avant cette date prédéterminée et qu’ils doivent communiquer avec votre cabinet en l’absence d’un tel appel. Expliquez-leur qu’il s’agit d’une mesure de protection contre la perte occasionnelle de résultats d’examen.
    • Demandez aux médecins suppléants de maintenir une liste des résultats en attente. À votre retour, passez cette liste en revue et assumez la responsabilité du suivi de ces résultats.
    • Tenez compte de la fréquence à laquelle vous exercez dans chacun de vos lieux de travail et déterminez si vous êtes en mesure d’évaluer les résultats d’examen en temps opportun.
    • Si vous le pouvez, liez votre facturation à la réception des résultats d’examen : pas de résultats, pas de facture.
  5. Les résultats sont analysés
    Problème :
    Les résultats d’examen ont été transmis, mais le médecin ne les a pas vus.
    Solutions suggérées :
    • Passez régulièrement en revue les résultats d’examen afin de désencombrer votre boîte de réception.
    • Désignez des membres du personnel et formez-les pour qu’ils puissent analyser les résultats d’examen et signaler les résultats anormaux.
    • En ce qui concerne les résultats que vous n’avez pas passés en revue, ne cliquez pas sur « Revu » ou « OK » seulement pour vous « débarrasser » d’une alerte de DME ou d’un message de rappel.
  6. Les résultats sont consignés au dossier
    Problème :
    Les résultats d’examen sont versés au dossier avant que le médecin ne les ait passés en revue
    Solutions suggérées :
    • Avisez le personnel de ne pas verser de résultats au dossier avant que vous n’ayez eu le temps de les passer en revue et de créer un plan d’action en conséquence.
    • Approuvez les résultats et décrivez brièvement les mesures prises.
  7. Le patient est avisé des résultats
    Problème :
    Le patient n’est pas avisé des résultats ou des mesures requises.
    Solutions suggérées :
    • Avant de donner suite aux demandes téléphoniques de renouvellement d’ordonnance, vérifiez si des résultats sont en attente.
    • Établissez une politique quant au nombre de fois que le personnel de votre cabinet appellera le patient pour le suivi d’une demande d’examen particulière, ainsi qu’en ce qui concerne le moment et la façon d’utiliser une méthode de rechange (p. ex. communiquer avec la personne à joindre en cas d’urgence, en ayant au préalable obtenu le consentement du patient).
    • Créez une alerte (signalant la situation) qui sera portée à votre attention et à celle de votre personnel la prochaine fois que vous communiquerez avec le patient.
  8. Le patient fait l’objet du suivi requis
    Problème :
    Le médecin ne prend pas de mesures à la suite de la réception des résultats d’examen.
    Solutions suggérées :
    • Lorsqu’une investigation de suivi s’impose, prescrivez-la sur-le-champ dans la mesure du possible (n’attendez pas).
    • Assurez-vous d’inclure les résultats d’examen aux demandes de consultation pour qu’elles soient adéquatement mises en ordre de priorité par le médecin consultant.
    • En cas d’incertitude quant au suivi, communiquez avec les autres médecins du cercle de soins afin de déterminer si des mesures ont été mises en œuvre.

Suite du scénario : Une amélioration potentielle

La chirurgienne et ses collègues s’attellent à améliorer leur système de suivi. Puisque leur système de DME ne permet pas le suivi des résultats d’examen, ils demandent à leur adjoint administratif de créer et de gérer un système parallèle, fondé sur une feuille de calcul électronique, pour assurer le suivi des résultats. Les chirurgiens décident d’harmoniser leurs pratiques, y compris la façon dont ils reçoivent les résultats de l’adjoint administratif. Ils songent à accorder automatiquement un rendez-vous de suivi à chaque patient. Toutefois, en raison d’un manque d’espace à la clinique, ils choisissent de demander à l’adjoint administratif de communiquer avec tous les patients, même en présence de résultats normaux. Pour favoriser l’adhésion aux plans de traitement, ils créent une simple fiche à remettre au patient soulignant l’importance de l’exécution des examens prescrits. Ils font preuve d’une rigueur renouvelée quant à la consignation au dossier des rendez-vous manqués et des rappels visant les patients difficiles à joindre. Enfin, pour éviter que des résultats passent inaperçus pendant les absences des médecins à qui ils sont destinés, ils confient chaque semaine à un chirurgien la responsabilité de prendre en charge les résultats anormaux destinés à ses collègues absents.

Apprenez-en davantage

Consultez la page Ateliers pour en apprendre davantage sur les systèmes de suivi des résultats d’examen.

  • Inscrivez-vous à un atelier de l’ACPM prochainement offert près de chez vous : « Pas de nouvelles, bonnes nouvelles? Créez un système plus fiable pour le suivi des résultats d’examen »
  • Écoutez le balado de l’ACPM intitulé « Créez un système plus fiable pour le suivi des résultats d’examen » et obtenez accès à d’autres ressources utiles de l’ACPM et d’autres organisations.

 


 

Références

  1. Agency for Healthcare Research and Quality [En ligne]. Rockville (MD): AHRQ. Improving Your Laboratory Testing Process [révisé en janvier 2018; cité en décembre 2018]. Disponible : https://www.ahrq.gov/professionals/quality-patient-safety/hais/tools/ambulatory-care/labtesting-toolkit.html
  2. Pour obtenir plus de renseignements sur l’utilisation adéquate des traitements et des examens cliniques, consultez le site Choisir avec soin au http://www.choisiravecsoin.org/

AVIS : Les renseignements publiés dans le présent document sont destinés uniquement à des fins générales. Ils ne constituent pas des conseils professionnels spécifiques de nature médicale ou juridique, et n’ont pas pour objet d’établir une « norme de pratique » à l’intention des personnes exerçant une profession de la santé au Canada. L’emploi que vous faites des ressources éducatives de l’ACPM est visé par ce qui précède et l’avis de non-responsabilité de l’ACPM dans son intégralité, « Contrat d’utilisation de l’ACPM ».