Il n’est pas rare que les médecins reçoivent des renseignements sur leurs patients de la part d’autres personnes : c’est ce qu’on appelle des renseignements collatéraux. Quand un tiers nous communique des renseignements non sollicités sur une ou un membre de notre patientèle, le fait de savoir comment réagir peut atténuer notre sentiment de malaise et nous aider à prodiguer de bons soins à la personne concernée.
Recevoir des renseignements collatéraux
Quand on reçoit des renseignements collatéraux, c’est généralement de la part d’une ou d’un proche de la personne sous nos soins. Cela dit, ces renseignements peuvent aussi nous parvenir autrement : au cours d’activités sociales, par l’intermédiaire d’un appel ou d’un courriel d’un employeur ou d’un établissement scolaire, ou encore par les médias sociaux (publication ou message privé). Peut-être avez-vous déjà vécu une situation analogue à celles décrites dans les scénarios suivants.
- Alors que sa fille se trouve dans la salle d’attente, hors de portée de voix, la mère d’une adolescente vous confie qu’elle soupçonne un trouble alimentaire chez celle-ci.
- Le fils adulte d’un de vos patients vous téléphone à votre cabinet. Il vous explique que son père souffre de graves problèmes cognitifs – il lui arrive aussi de conduire avec les facultés affaiblies – et vous demande de l’évaluer à son prochain rendez-vous.
- Vous assistez à un tournoi sportif à l’école de vos enfants. À cette occasion, un parent vous fait part de ses préoccupations à l’égard d’une connaissance commune qui semble lourdement déprimée : « Est-ce que c’est l’un de tes patients? Peux-tu faire quelque chose? »
Le fait de recevoir ce type de renseignements peut être déstabilisant, parce qu’il nous met face à des responsabilités contradictoires. D’un côté, si l’intérêt de la patiente ou du patient est en jeu ou que la situation pose un risque pour la sécurité, on estime avoir la responsabilité d’agir. De l’autre, il se peut qu’on ne sache pas vraiment comment procéder vu que les renseignements nous ont été fournis par un moyen non conventionnel.
Prochaines étapes possibles
Comment gère-t-on des renseignements collatéraux? Tout dépend des circonstances. D’abord, il peut être utile de répondre à deux questions au sujet de l’information reçue.
- Les renseignements sont-ils crédibles?
- Dans l’affirmative, y a-t-il des mesures qui doivent être prises?
Répondez à ces questions en utilisant votre jugement et en tenant compte des facteurs suivants :
- La relation entre la personne sous vos soins et celle qui vous a fourni les renseignements
- Le rôle de l’informatrice ou de l’informateur dans les soins à la personne concernée et sa connaissance de son état de santé
- Le contexte dans lequel les renseignements ont été fournis
Pensez aux raisons qui poussent la personne à vous confier ces renseignements et demandez-vous s’ils sont corroborés par d’autres éléments du dossier médical. Quand c’est possible, n’hésitez pas à faire votre propre évaluation de la patiente ou du patient pour jauger la validité des renseignements qui vous ont été transmis.
Si vous concluez que l’information n’est ni crédible ni recevable, il n’y a pas nécessairement lieu de l’inscrire dans le dossier médical. Toutefois, vous devez consigner toutes les mesures que vous prenez après avoir reçu des renseignements d’un tiers. Si vous avez des questions sur des situations précises dans lesquelles vous avez reçu des renseignements collatéraux, veuillez communiquer avec l’ACPM pour obtenir conseil.
Incidence sur la protection des renseignements personnels
De façon générale, les lois sur la protection des renseignements personnels n’autorisent la collecte de renseignements collatéraux que lorsque ceux-ci sont raisonnablement nécessaires à la prestation de soins de santé et qu’il n’est pas raisonnablement possible de recueillir les renseignements en question auprès de la patiente ou du patient directement. Par exemple, il est bien souvent approprié et nécessaire de recueillir des renseignements collatéraux auprès de membres de la famille quand la patiente ou le patient est mentalement instable et menace de se faire du mal, ou en cas d’inaptitude ou de perte de conscience. Bien qu’il puisse y avoir lieu de recueillir des renseignements collatéraux dans des circonstances comme celles-là, il n’est généralement pas permis de communiquer des renseignements sur la patiente ou le patient à la personne qui vous transmet l’information (sauf si vous avez obtenu un consentement ou une autre autorisation légale).
Conformément à ce principe de protection des renseignements personnels, les médecins doivent généralement s’abstenir de fouiller dans les médias sociaux pour obtenir des renseignements sur la santé d’une personne sans son consentement, sauf dans des cas bien particuliers (p. ex. préoccupations pour la sécurité).
Recevoir des renseignements collatéraux peut s’avérer plus délicat quand on vous demande expressément de ne pas dire à la patiente ou au patient d’où provient l’information. Même si vous n’avez aucun devoir de confidentialité envers le tiers, les lois sur la protection des renseignements personnels renferment certaines exceptions en vertu desquelles il est permis, voire requis, de s’abstenir de transmettre de l’information qui pourrait mener à l’identification de la personne ayant divulgué les renseignements (en présumant que vous prenez des mesures en réponse à ceux-ci et que vous les consignez au dossier médical). Par exemple, en vertu de l’article 52(1)(e)(iii) de la Loi sur la protection des renseignements personnels sur la santé de l’Ontario, il est permis de s’abstenir de divulguer des renseignements à la patiente ou au patient si ceux-ci ont été fournis de façon confidentielle par un tiers et que la ou le médecin estime qu’il serait raisonnable que l’identité du tiers demeure confidentielle.
Les membres qui souhaitent en savoir plus sur la gestion des renseignements collatéraux sur les patients sont invités à communiquer avec l’ACPM.
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