Remarque : Cet article a été publié à l’origine dans Hospital News.
« Le sepsis est l’une des plus importantes causes de décès dans le monde », affirme Jacqueline Fortier, gestionnaire, section Synthèse des données probantes à l’Association canadienne de protection médicale (ACPM). « Mais il est parfois difficile de le diagnostiquer, ce qui peut retarder la mise sur pied d’un traitement. C’est ce qui a incité l’ACPM à publier cette nouvelle étude. »
« Nous voulons fournir aux professionnels de la santé des conseils pratiques pour qu’ils détectent le sepsis sans tarder », ajoute Jacqueline Fortier.
Cette nouvelle étude de l’ACPM, intitulée Diagnostic delays in sepsis: Lessons learned from a retrospective study of Canadian medico-legal claims et maintenant accessible dans la dernière édition de Critical Care Explorations, traite des défis inhérents au diagnostic du sepsis; elle renferme aussi des conseils pour les médecins, notamment sur l’importance de communiquer et de collaborer pour éviter les diagnostics tardifs.
Le sepsis doit être diagnostiqué sans tarder
Le sepsis se produit quand une réaction grave de l’organisme à une infection entraîne une dysfonction organique. Quelque 75 000 cas sont recensés chaque année au Canada seulement, dont plus de 16 000 se soldent par un décès. Les infections n’aboutissent pas toutes à un sepsis. Il n’est donc pas toujours évident de déterminer si les premiers symptômes non spécifiques que manifestent les patients finiront par dégénérer en sepsis; pensons notamment à la fièvre, à l’inconfort et à la tachycardie. Les retards de diagnostic peuvent nuire à l’issue clinique et entraîner une hausse du taux de mortalité.
L’étude de l’ACPM est axée sur les dossiers médico-légaux (y compris les plaintes auprès des organismes de réglementation [Collèges], les plaintes intrahospitalières et les actions civiles) réglés entre 2011 et 2020. En général, les données de l’ACPM ne reflètent qu’une très petite proportion des dossiers : ceux dans lesquels les plaignants (p. ex. patients ou professionnels de la santé) estiment qu’il y a eu manquement à la norme de pratique de la part de la ou du médecin. Le but de l’ACPM est d’analyser ce qui s’est mal passé, puis, sur la base de ces connaissances, de diffuser de l’information pour améliorer la sécurité globale des patients. L’équipe de recherche a ciblé 1 075 dossiers se rapportant au sepsis ou à des infections analogues. Dans 163 d’entre eux (15,2 %), le processus diagnostique a été critiqué par des pairs. Les dossiers portent sur des cas qui se sont produits dans divers milieux de soins – cabinets de médecine familiale, cliniques sans rendez-vous, hôpitaux et urgences – et la plupart des médecins en cause étaient des spécialistes en médecine familiale, en médecine d’urgence ou en chirurgie.
Des leçons pour les médecins : miser sur la communication
L’importance d’une bonne communication entre professionnels de la santé : voilà l’un des principaux points à retenir de cette étude. Dans certains cas, la ou le médecin n’a pas nécessairement eu vent de la détérioration des signes vitaux; dans d’autres, elle ou il n’a pas donné assez de détails au personnel infirmier sur la marche à suivre si l’état de santé devait se détériorer. En travaillant en équipe pour établir une culture de collaboration et pour alimenter la conscience situationnelle collective, on peut limiter les conséquences de ces problèmes potentiels.
La communication avec les patients et leur famille est un autre facteur clé à prendre en compte pour limiter les retards de diagnostic du sepsis. Le sepsis est un processus évolutif : il peut être difficile de déterminer quand certaines infections courantes – pneumonie, grippe ou streptocoque – dégénèrent jusque-là.
« Les médecins doivent s’assurer que les patients savent reconnaître leurs nouveaux symptômes ou une aggravation de leurs symptômes », indique le Dr Gary Garber, directeur, Soins médicaux sécuritaires – Recherche, ACPM. « Quand les patients rentrent chez eux, on doit leur avoir expliqué la forme que prendra la progression de leurs symptômes si elle devait survenir, et dans quelles circonstances ils doivent se faire réévaluer. »
Selon l’étude de l’ACPM, des consultations médicales répétées peuvent être un signe précurseur de sepsis. Selon cette analyse, près de la moitié des patients se rendent plusieurs fois chez leur médecin de famille, dans une clinique sans rendez-vous ou à l’urgence au cours de la période précédant l’apparition et le diagnostic du sepsis; jusqu’à cinq fois dans certains cas. Quand quelqu’un a sollicité des soins à répétition, la vigilance peut être de rigueur au moment de la réévaluation clinique.
L’ACPM : favoriser la sécurité des patients par des études publiées dans des revues examinées par des pairs
Les études de recherche de l’ACPM publiées dans des revues examinées par des pairs sont réalisées à l’aide des données de l’Association, qui dispose de la plus vaste collection de données médico-légales sur des médecins au monde. Les études de recherche de l’ACPM publiées dans des revues examinées par des pairs orientent l’élaboration de produits et services fondés sur des données probantes, contribuant ce faisant à renforcer la sécurité des soins aux patients et à réduire le risque d’événements préjudiciables.
Sur le site web de l’ACPM, on retrouve des études qui ont été publiées et des ressources éducatives fort utiles pour aider les médecins à améliorer la sécurité des patients, comme des bonnes pratiques et des modules d’apprentissage en ligne. En plus d’offrir à ses médecins membres une assistance et des conseils médico-légaux, l’ACPM verse, en leur nom, une compensation financière aux patients lorsqu’on a démontré qu’ils ont subi un préjudice à la suite de soins médicaux négligents (ou, au Québec, d’une faute professionnelle).
« Grâce à cette analyse, on voit mieux où les médecins et les autres professionnels de la santé peuvent concentrer leurs efforts d’amélioration de la prise en charge du sepsis », estime le Dr Garber. « Nous sommes à élaborer de nouvelles ressources sur la base de cette étude, dans l’optique d’aider les médecins à réduire les risques associés à un diagnostic tardif du sepsis et à renforcer la sécurité des patients. »