Risques médico-légaux en urologie : ce que les médecins doivent savoir

Sachez quels sont vos risques – Données par spécialité clinique

Médecin tenant un urétroscope chirurgical

6 minutes

Published: octobre 2024

À la fin de 2022, l’ACPM comptait 715 urologues parmi ses membres (code de travail 88).

Le graphique ci-dessous présente une comparaison des tendances observées sur une période de 10 ans dans les dossiers médico-légaux ciblant les urologues et l’ensemble des autres spécialités chirurgicales.

Quels sont les risques relatifs de problème médico-légal chez les urologues?

  •  Urologie, plaintes aux Collèges (n = 634)
  •  Urologie, actions en justice (n = 266)
  • Autres spécialités chirurgicales, plaintes aux Collèges (n =7 159)
  •   Autres spécialités chirurgicales, actions en justice (n = 4 351)

Entre 2013 et 2022, on a observé un taux de plaintes aux Collèges1 Sur cette période de 10 ans, le taux d’actions civiles en urologie était généralement inférieur à celui observé pour l’ensemble des spécialités chirurgicales.

Sur cette période de 10 ans, le taux d’actions civiles en urologie était généralement inférieur à celui observé pour l’ensemble des spécialités chirurgicales.

Par rapport aux autres urologues, quel est le risque de vous faire citer dans des dossiers médico-légaux?

Pourcentage d’urologues, fréquence des dossiers sur 5 ans


Sur 5 ans
Aucun dossier 59,8
1 dossier 25,6
2 à 4 dossiers 13,1
5 dossiers ou plus 1,5

Pourcentage d’urologues, fréquence des dossiers sur 1 an



Sur 1 an
Aucun dossier 86,9
1 dossier 11,3
2 dossiers ou plus 1,8

Sur une période de 5 ans (2019-2023)2, 13,1 % des urologues ont eu leur nom cité dans deux, trois ou quatre dossiers. Cela signifie que sur l’ensemble des urologues, 13,1 % comptaient plus de dossiers que 85,4 % des autres urologues, qui n’en comptaient aucun ou un seul sur 5 ans. De plus, 1,5 % de ces spécialistes comptaient cinq dossiers ou plus au cours de cette période de 5 ans (soit la fréquence la plus élevée).

De plus, 1,8 % de ces spécialistes comptaient en moyenne deux dossiers ou plus par année, et donc plus de dossiers que 98,2 % des autres médecins de la même spécialité.

Les sections suivantes présentent les résultats tirés de 625 dossiers d’actions en justice, de plaintes aux Collèges et de plaintes auprès d’hôpitaux conclus par l’ACPM entre 2013 et 2022, et visant des urologues.

Quelles sont les plaintes le plus souvent émises par les personnes soignées et les critiques le plus couramment formulées par l’expertise médicale?3 (n = 625)

Issue %, Allégations des patient·es %, Critiques formulées par l’expertise médicale
Évaluation déficiente 42 13
Erreur de diagnostic 37 25
Surveillance ou suivi inadéquats 27 13
Processus de consentement inadéquat 24 14
Comportement non professionnel 23 8
Problèmes de communication médecin-patient·e 22 16
Manquement à faire un test ou une intervention 18 13
Préjudice associé à la prestation de soins de santé 17 13
Défaut d’orienter la personne vers une ou un collègue 8 4
Mauvaise prise de décision en matière de prise en charge 7 4

Les plaintes sont fondées sur le fait que, du point de vue des personnes traitées, un problème est survenu au cours de la prestation des soins. Les plaintes ne sont pas toujours appuyées par l’opinion de l’expertise médicale. Il arrive que l’expertise n’ait pas de critiques à formuler quant aux soins prodigués, ou que ses critiques ne soient pas en lien avec les allégations des personnes soignées.

Quelles sont les interventions faisant le plus souvent l’objet de critiques de l’expertise médicale? (n = 625)

  •   Cystectomie partielle ou radicale (33)
  •   Néphrectomie : laparoscopie, convertie, laparotomie (27)
  •   Extraction et destruction de calculs urinaires avec ou sans pose d’endoprothèse (24)
  •   Résection transurétrale de la prostate (RTUP) (17)
  •   Prostatectomie radicale (14)
  •   Biopsie des tissus génito-urinaires (p. ex. prostate, vessie, testicules, ganglions lymphatiques) (14)

La fréquence des interventions recensées dans les dossiers médico-légaux est, selon toute probabilité, représentative de ce qu’on observe dans la pratique des urologues; toutefois, elle ne reflète pas nécessairement les interventions à risque élevé.

Critiques formulées par l’expertise médicale

  • Évaluation déficiente
  • Tenue de dossiers inadéquate
  • Retard ou manquement dans l’exécution d’un test ou d’une intervention
  • Processus de consentement inadéquat
  • Surveillance ou suivi inadéquats des patient·es
  • Connaissances ou compétences insuffisantes

Sur ces 625 dossiers, 25 % (154/625) des personnes traitées ont fait l’objet d’un diagnostic manqué, d’un retard de diagnostic ou d’une erreur de diagnostic. Par exemple :

  • Défaut d’assurer le suivi de résultats anormaux d’une cytologie, retardant le diagnostic de cancer de la vessie et entraînant la formation de métastases
  • Retard du diagnostic de cancer de la vessie, l’urologue ayant omis de mentionner la présence possible d’une masse dans la vessie qui aurait nécessité un suivi échographique du rapport de tomodensitométrie rénale

Dans ces dossiers, 13 % des personnes ont été blessées lors d’une intervention. Par exemple :

  • Blessures aux uretères ou à la vessie durant une urétéroscopie, une RTUTV/RTUP ou une suspension vésicale
  • Blessures aux organes abdominaux, aux vaisseaux sanguins ou aux nerfs

De plus, l’oubli d’un corps étranger après l’intervention a été constaté chez 15 personnes, et l’exécution d’une mauvaise intervention ou d’une intervention du mauvais côté a été découverte chez 14 autres.

Quels sont les principaux facteurs associés à un préjudice grave4 dans les dossiers médico-légaux? (n = 625)

Facteurs liés aux patient·es5

  • Score ASA de 3 ou plus6
  • Obésité
  • Présence d’un cancer (p. ex. prostate, rein, vessie)
  • Antécédents de cancer, intervention chirurgicale majeure, utilisation à long terme de médicaments tels que les anticoagulants

Facteurs liés aux médecins7

  • Évaluation déficiente
  • Manquement à faire un test ou une intervention
  • Mauvais processus de décision clinique, par exemple :
    • Défaut d’envisager les alternatives opératoires (p. ex. laparoscopie plutôt que chirurgie ouverte) dans les cas complexes
    • Défaut de réévaluer l’approche opératoire ou de demander de l’aide en cas de changements en période peropératoire
  • Mauvaise identification de la structure anatomique
  • Dérogation à une procédure administrative, comme la gestion des demandes de consultation et le suivi postopératoire

Facteurs liés au système7

  • Équipement défectueux (p. ex. laser, endoscope)

Facteurs liés à l’équipe7

  • Processus inadéquat de transfert des soins, y compris une mauvaise tenue de dossier empêchant la ou le médecin devant prendre le relais de bien comprendre le dossier

Aide-mémoire pour réduire les risques

D’après l’étude des dossiers de l’ACPM visant des urologues, les risques peuvent être gérés comme suit :

Période préopératoire

  • Avoir conscience des comorbidités et des antécédents chirurgicaux de la personne traitée, et s’assurer que l’ensemble des prestataires de soins sont mobilisés de manière appropriée (p. ex. consulter l’hématologie pour les patientes et patients qui prennent des anticoagulants, le cas échéant).
  • S’assurer d’avoir pris connaissance de tous les résultats d’examen et de l’imagerie préopératoire, et veiller à ce que ces documents se trouvent dans le dossier médical aux fins de consultation le jour de l’intervention.
  • Prévoir des dispositions pour les personnes ayant des particularités anatomiques.

Période peropératoire

  • Envisager de modifier sa technique ou de consulter une ou un collègue en cas de problème durant l’intervention chirurgicale. Consigner, dans les plus brefs délais, toutes les mesures prises pour protéger les structures et les organes vitaux, y compris les techniques chirurgicales ainsi que les découvertes et les variantes anatomiques, de même que tous les problèmes rencontrés et les mesures prises pour les résoudre.
  • Adopter des protocoles de sécurité chirurgicale normalisés (p. ex. liste de vérification pour une chirurgie sécuritaire) et s’y conformer pour assurer la conscience situationnelle de l’équipe interdisciplinaire et améliorer les pratiques de vérification (p. ex. personne traitée, site, intervention et dénombrement).

Période postopératoire

  • Les résultats sous-optimaux sont attribuables aux risques inhérents d’une intervention; cependant, certains résultats défavorables peuvent généralement être évités par une bonne planification et par des protocoles de sécurité adéquats. Assurer un suivi approprié des complications réelles et potentielles.
  • Divulguer sans délai à la personne traitée toute complication ou difficulté survenue au cours d’une intervention chirurgicale ou autre. Discuter avec la personne traitée des répercussions et des complications possibles après l’intervention chirurgicale ou autre, ainsi que des soins de suivi, en misant sur une communication ouverte. S’assurer que la patiente ou le patient a compris l’information fournie. Consignez ces discussions dans le dossier médical.
  • Lorsque la situation s’y prête et au moyen d’approches conformes aux politiques et aux lignes directrices de leur établissement et du Collège, les médecins devraient se porter à la défense des personnes traitées pour résoudre les problèmes découlant de situations où la restriction des ressources (p. ex. non-disponibilité de l’imagerie médicale le soir) entrave la sécurité des soins. Il importe de verser au dossier toute mesure prise en vue de surmonter le problème de ressources.

Limites

Les nombres qui figurent dans ce rapport sont tirés des données médico-légales de l’ACPM. Les dossiers médico-légaux de l’ACPM ne représentent qu’une petite proportion des incidents liés à la sécurité des patientes et patients. De nombreux facteurs peuvent inciter une personne à intenter une poursuite ou à déposer une plainte, et ces facteurs varient grandement en fonction du contexte. Les dossiers médico-légaux peuvent donc être une précieuse source d’information sur des sujets importants, mais on ne peut les considérer comme représentatifs de l’ensemble des incidents liés à la sécurité des patientes et patients.

Maintenant que vous connaissez les risques liés à votre travail…

Limitez les risques médico-légaux grâce aux ressources de l’ACPM.

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Notes

  1. Les médecins n’ont pas l’obligation de signaler les plaintes au Collège à l’ACPM, et ne le font que sur une base volontaire. Par conséquent, il n’est pas possible de brosser un portrait complet de ce type de dossiers au Canada.
  2. En moyenne, un dossier médico-légal est ouvert deux à trois ans après un incident lié à la sécurité d’une ou d’un patient. Ainsi, il est possible qu’un nouveau dossier médico-légal concerne un incident survenu il y a quelques années.
  3. Par expertise médicale, on entend les médecins experts et expertes qui interprètent les problèmes cliniques, scientifiques ou techniques liés aux soins prodigués et qui émettent une opinion à leur égard. Ces médecins ont habituellement une formation et une expérience semblables à celles de leurs collègues ayant prodigué les soins à évaluer.
  4. Un préjudice grave est un préjudice qui cause la mort, une blessure invalidante ou une incapacité majeure. Un préjudice lié aux soins de santé peut être attribuable au risque inhérent d’une investigation, d’un médicament ou d’un traitement. II peut également découler d’une défaillance dans le processus de prestation des soins.
  5. Les facteurs liés aux patientes et patients regroupent toutes les caractéristiques ou les affections médicales présentes au moment de la consultation médicale, ou tout événement survenant durant la consultation.
  6. La classification de l’état physique de l’American Society of Anesthesiologists (ASA) est utilisée par les médecins pour prévoir les risques auxquels les patientes et patients sont exposés avant une intervention chirurgicale. Un score ASA de 3 indique une maladie systémique grave.
  7. D’après l’opinion d’expertes et d’experts.